| Comme elle était jeune et belle, ma petite mère, En débarquant dans ce désert.
 Bien vite, s'évertua notre père
 A construire notre maison sur la colline.
 Et les printemps se succédèrent,
 Un demi siècle s'est écoulé,
 En mèches blanches se transformèrent
 les boucles brunes.
 Or sur la rive du JourdainRien ne sembla s'être passé ;
 Même silence, même apparence;
 Un odorant bosquet d'Eucalyptus,
 Un pont,
 Une barque,
 Une brise salée qui effleure les eaux.
 Au sein du foyer a surgiUne joyeuse nichée d'enfants
 Qui barbotèrent dans le Jourdain.
 Les gosses ont grandi et surent tôt nager,
 Leur jeunesse affronta l'ouragan des années.
 Or sur la rive du JourdainRien ne semble s'être passé ;
 Même silence, même fragrance,
 Vastes ombrages d'Eucalyptus,
 Un pont,
 Une barque,
 Une brise salée qui affleure les eaux.
 Les canons ont tonné par dessus le JourdainMais la paix nous revint à la fin de l'été.
 Et devenus des hommes, les enfants de naguère,
 A leur tour sur notre colline
 Se sont bâtis à chacun sa maison.
 Or sur la rive du JourdainRien ne semblera se passer ;
 Même silence, même semblance,
 Une forêt d'Eucalyptus,
 Un pont,
 Une barque,
 Une brise salée qui caresse les eaux.
  
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